Ce constat, bien qu’il soit alarmant, n’est en fait qu’un secret de Polichinelle ! Mais il demeure intéressant de mettre pleins feux sur un état des lieux qui laisse encore à désirer.
Locomotive du transport public dans le pays, la Société nationale des chemins de fer tunisiens, plus connue sous son acronyme Sncft, n’a toujours pas le vent en poupe. Faute de bonne gouvernance et de restructuration à temps, elle a fini en queue de poisson. Nos trains, tout le monde le sait, n’arrivent jamais à l’heure. A leur bord, il n’y a plus de confort ! Et la situation générale en dit encore long : «Infrastructure gravement dégradée, réseau ferroviaire vétuste à flotte réduite, entrepôts non conformes aux normes de santé et de sécurité, sans maintenance ni pièces de rechange nécessaires, passages à niveau mal protégés et des agents sujets à de fréquentes agressions», c’est ce qu’a, texto, relevé Salah Ansari, membre du bureau exécutif régional de l’Ugtt, lors d’une conférence de presse, tenue hier matin à son siège à Tunis.
Ce constat, bien qu’il soit alarmant, n’est en fait qu’un secret de Polichinelle ! Mais, pour lui, il demeure essentiel d’éclairer la lanterne de l’opinion et mettre pleins feux sur un état des lieux qui laisse encore à désirer. Depuis des années, la Sncft, d’ailleurs comme d’autres entreprises similaires, s’enlise dans une situation sociale et financière assez précaire. L’Etat, son unique propriétaire, n’est pas, semble-t-il, en mesure de rectifier le tir, faisant planer le doute sur sa vente aux enchères. Pour l’Ugtt, un tel sort est une ligne rouge. Face à cette situation, le syndicat des cheminots, sous l’égide de la centrale ouvrière, a fait porter à la société et au ministère de tutelle l’entière responsabilité. Ils ont, même, évoqué certains soupçons de corruption liés à des marchés publics conclus en matière d’acquisition des moteurs des locomotives. Et la vérité des problèmes entravant le parachèvement du Réseau ferroviaire rapide (RFR) n’a pas été, jusqu’ici, dévoilée. L’électrification des lignes desservant la banlieue sud de la capitale fait, elle aussi, défaut. Avec des retards accusés maintes fois, auxquels s’ajoutent autant d’accidents survenus sur le réseau ferroviaire.
Escalade à l’horizon ?
A la Sncft, tout un chantier entouré du flou persistant ! Sans stratégie ni feuille de route, nos trains naviguent à vue. La société, dont le rôle socioéconomique est capital, n’arrive pas à trouver son compte. L’ancien ministre des Transports, Moez Chakchouk, avait évalué à plus de 800 millions de dinars ses pertes cumulées en 2020, évoquant, à l’époque, un plan stratégique axé sur la réhabilitation des infrastructures, le renouvellement des équipements, l’amélioration de la gouvernance, le rétablissement des équilibres financiers et le développement des services. Depuis, on ne voit rien venir. Avec un réseau ferroviaire long de plus de 2.000 km, il y en a plusieurs jusque-là non exploités. Ce qui a pesé lourd sur le transport du phosphate et la desserte des régions les plus lointaines. De même, le parc des trains a trop diminué, alors que la qualité des prestations fournies par la Sncft semble reléguée à l’arrière-plan.
L’ambiance professionnelle est telle qu’elle a exacerbé les tensions, faisant entendre des voix de protestation. «Aujourd’hui, on ne peut plus patienter. Nos revendications ne sont pas matérielles, elles relèvent plutôt de notre devoir à l’égard de notre société et sa pérennité», dixit Neji Hamdi, secrétaire général adjoint de l’Union régionale de l’Ugtt à Tunis, mettant l’accent sur la sécurité des agents et leur protection contre toute forme d’agressions. D’ici à vendredi, les cheminots vont décider des étapes suivantes, sans pour autant écarter l’hypothèse de prochains mouvements de protestation.